Un cortège de 20 000 manifestants anti-capitalistes défile à Francfort
Le Monde.fr |
Par Luc Vinogradoff
Près de 20 000 personnes, selon la police, et 25 000, selon les organisateurs, ont manifesté à l'appel du collectif Blockupy, samedi 19 mai à Francfort, pour dénoncer le règne de l'austérité en Europe et exiger l'abandon d'une politique économique qui privilégie à leurs yeux le secteur financier et non le peuple.
Le cortège, qui partait du quartier de la gare de Francfort, devait arriver devant le siège de la Banque centrale européenne (BCE), partie intégrante de la Troika, et symbole des dérives économiques de l'UE. Il n'en fut rien. Les autorités locales avaient autorisé la manifestation - la seule depuis quatre jours que dure les protestations - mais n'ont pas accepté à la dernière minute l'itinéraire proposé par les organisateurs, estimant que le risque de débordements était trop important.
Tout au long du trajet, le dispositif policier massif déployé dans la capitale financière allemande a encadré de près le cortège. Le défilé est partie avec une heure de retard, les milliers de personnes affluant du centre-ville ayant eu du mal à entrer dans la petite Baseler Platz, bien entendu quadrillée par la police. Des jeunes gens, portant des drapeaux noirs ou des drapeaux des jeunes Verts allemands, en profitaient pour s'écrire sur le bras le numéro des urgences médicales en cas d'incidents. Pendant que les orateurs se succédaient au micro pour rappeler l'ordre de passage et répéter le message du jour - "Protester contre la politique européenne, mais aussi allemande, d'austérité", comme le rappela un syndicaliste britannique - un hélicoptère survolait la place bruyamment.
"BANKFURT"
Le choix de Francfort, rebaptisé "Bankfurt" pour l'occasion, n'est pas un hasard. Il s'agit non seulement du centre financier de l'Allemagne, mais aussi d'une des villes les plus chères outre-Rhin. Gesine, qui y habite de Francfort et se présente comme une sympathisante du parti allemand Die Linke, n'a pas de mots assez durs sur le gouvernement d'Angela Merkel, surtout sur l'attitude vis-à-vis de la Grèce. "C'est un mensonge de dire que l'Allemagne s'en soit mieux sorti. Regardez les mini-salaires avec lesquelles notre jeunesse doit vivre", s'insurge-t-elle. A ses côtés, son mari un drapeau grec "en signe de solidarité".
Outre Die Linke, Attac était également très présente, avec plusieurs centaines de membres venus de France, Aurelié Trouvé, vice-présidente de l'ONG a expliqué que "venir en Allemagne pour dire non au pacte budgétaire est une façon de montrer que l'Europe ne se contruira pas avec la finance, mais avec les peuples".
A l'avant de l'impressionnant cortège, qui s'étire le long du Main, les partis politiques et les ONG, mais aussi des familles, des adolescents, des personnes venues de nombreuses villes d'Allemagne, mais aussi de France, d'Italie, d'Espagne, de Roumanie ou de Slovénie. A l'arrière, une importante partie de la manifestation était composée de groupes et associations anti-capitalistes, d'anarchistes et d'autonomistes. Plus jeunes, plus énervés, plus revendicatifs et plus bruyants. Les slogans de l'avant, appelant à une solidarité internationale - "Hoc die, Internationale Solidarität" - devenaient plus acerbes à l'arrière - "Staat, Nation, Kapital, Scheiße" (Etat, Nation, Capital, Merde).
Aucun incident n'a été signalé pendant la marche, qui s'est terminée aux alentours de 16 heures à quelques dizaines de mètres du but, le siège de la BCE. Mais personne ne veut y voir un quelconque signe d'échec. Pour les organisateurs, ce rassemblement anti-capitaliste de quatre jours dans la capitale financière de l'Allemagne était symbolique et nécessaire, pour montrer qu'ils restent vigilants alors qu'un consensus sur une politique de croissance, plutôt que d'austérité, semble apparaître en Europe.
Luc Vinogradoff
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